Charles (1891-1963)
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Généalogie
L'histoire
de la famille Bourdillon fait partie intégrante de l'histoire du Nivernais.
Rappelons-nous, dès le XI° siècle
sur le territoire d’Urzy, à proximité de Nevers, était installée au lieu dit les
Bordes une
famille des Bordes qui édifia le château du même nom.
A la fin du XIV° siècle,
Imbert de La Platière, d’une famille venue d’Arbois, épouse Péronnelle des
Bordes, qui, à la mort, de son oncle Jehan, hérite du château et du nom...
Les seigneurs de
La Platière
seront donc en outre seigneurs des Bordes. Ils habiteront le château.
Au XVI° siècle,
apparaît pour la première fois le patronyme Bourdillon (ou Bordillon).
C’est à dire petit Borde - diminutif accordé semble-t-il aux cadets de famille.
Il se trouve que Charles Bourdillon,
quelques siècles plus tard après de nombreuses péripéties, est venue exercer la
médecine à Nevers de 1927 à 1963. Il a joué un rôle important dans l'histoire de
l'Hôpital, et aussi dans l'histoire de la Résistance Nivernaise. Quelques points
saillants de son histoire mérite d’être racontée.
Charles
est né à Marseille le 11 octobre 1891.


Charles Bourdillon et son chien Bob / Militaire
La guerre de 14-18
Charles et son frère André partent pour le front suivi
par les deux plus jeunes frères Edouard et Jean (Edouard sera blessé). Charles
et Edouard seront décorés pour leur conduite courageuse
La médecine
Fils et neveu de médecins (il sera
aussi père et grand-père de médecins), il entreprend ses études de médecine,
elles seront interrompues par la grande guerre de 1914/1918 qu'il fera dans le
service de santé. Sa conduite courageuse sur le front lui vaudra d'être décoré
de la croix de guerre.
Interne des hôpitaux de Paris
Il est l'élève de Touraine et de Babinski
qui patronne sa thèse, "la craniectomie
décompressive". Ayant épousé une nivernaise en 1924, il
s'installe à Nevers en 1927, comme généraliste, avec cependant une double
spécialités : la neurologie et la dermatologie. De ce fait il est fréquemment
appelé en consultation par ses confrères de la campagne et des villes moyennes
du département, désireux de recueillir ses conseils sur les cas les plus
difficiles, il sillonne donc les routes de la Nièvre.

Charles Bourdillon, Interne à Cochin 1922 (troisième
ligne, 2ème à partir de la droite)

A mon élève et ami Charles Bourdillon. En
souvenir de la Pitié Novembre 1922
Résistant
1940
- Après la débâcle
des armées françaises, il entend le 17 juin le message du Maréchal Pétain et le
18 juin l'appel du Général de Gaulle et sans aucune hésitation, dès le premier
jour il choisit de Gaulle. Nevers est occupée par l'armée allemande. Charles
affirme aussitôt son hostilité au régime de Vichy qui prône la collaboration et
met ses espoirs dans la victoire des alliés et de la France Libre. Le moment
venu, il va s'engager avec Marius Durbet (futur maire de Nevers) dans la
Résistance Nivernaise (service de santé) sous la bannière de Pasteur Valléry
Radot et de Paul Milliez, avec comme principal objectif de ravitailler les
maquis en médicaments. Les deux principaux maquis de la Nièvre sont : les FFI
dirigés par le colonel Roche, et les FTPF dirigés par monsieur de Champeaux et
Roland Champenier
Dans le même temps il exerce toujours les
fonctions de médecin de l'hôpital et de la prison départementale…, ce qui lui
permet de constater que les médecins de l'armée allemande en service à
l'hôpital, qu'il fréquente quotidiennement Hail et Keuzer sont profondément
antinazis, et tentent de montrer aux Français qu'ils fréquentent le véritable
caractère du nazisme…, ce qui va lui donner en 1943 l'occasion d'intervenir de
façon efficace : pour tenter de s'opposer aux tortures pratiquées par la police
de Vichy contre une dizaine de détenus résistants et ensuite pour organiser leur
évasion.
1943
- Le gouvernement de Vichy a installé à Dijon
un "service de répression des menées antinationales" dirigé par le Commissaire
Fourcade. Celui-ci envoie le 1/10/1943 à Nevers une petite brigade de répression
sous l'autorité de l'inspecteur Dumontel, assisté de MM Grimbaire, Berriot,
Lebritz, Marais et Kohler. Cette brigade procède à l'arrestation d'un certain
nombre de résistants : MM Robert Genet, Georges Leblond, Marcel Raveau, Georges
Séverin, Henri Bussières, René Lepetit, Roger Beauger, qui sont incarcérés puis
torturés à l'École Normale.
Charles Bourdillon, médecin de la prison
et de l'hôpital de Nevers, constate ces exactions puis tente de s'opposer aux
tortures. Il juge nécessaire d'alerter M Tardivat, substitut du Procureur de la
République. En vue d'une concertation préalable, il le rencontre à son domicile
9 rue de la Chaussade, puis décide d'hospitaliser les victimes et de demander un
rendez vous au préfet Dramard qui le reçoit en présence de l'inspecteur Dumontel
et du substitut. Cet entretien lui permet d'élever une vigoureuse protestation
contre les tortures. Le Préfet choisit de s'étonner, l'Inspecteur Dumontel
choisit de s'indigner… que l'on puisse critiquer ses méthodes de lutte contre le
terrorisme.
Tirant les conséquences de l'échec de cet
entretien, Charles Bourdillon décide d'adresser au Préfet de la Nièvre et au
Maire de Nevers (qui est en même temps Président de la Commission Administrative
de l'Hôpital) une solennelle protestation.
Apprenant que l'inspecteur Dumontel veut
réincarcérer Leblond, Charles Bourdillon fait un faux diagnostic d'appendicite.
Leblond sera opéré par le docteur Duncombe.
Le 6 novembre 1943, six résistants
hospitalisés, dont Leblond s'évadent de l'hôpital.
Aussitôt révoqué par le préfet Dramard,
le docteur Charles Bourdillon abandonne ses fonctions de médecin de l'hôpital et
de médecin de la prison.
1944 -
Beaucoup plus tard (mai 1944), Charles
sera longuement interrogé par le capitaine Mohr (Gestapo de la rue Jeanne
d'Arc), et ressortira libre de cet interrogatoire. Apparemment selon M Salauze,
Directeur Départemental de la Santé son dossier n'était pas encore parvenu de
Dijon à Nevers…
Encore plus tard, peu de temps avant la
Libération il sera réintégré dans ses fonctions par de Beaumais le dernier
préfet de Vichy (1/06/1944).
Au cours de ce premier semestre 1944, la
nervosité de l'armée allemande est à son comble : accrochages avec les maquis,
massacres (Druy Parigny), incarcération et assassinats de médecins résistants :
Fanjoux de Cercy la Tour et Lévêque de Jouet sur l'Aubois sont jetés en prison,
Hélion de Saint Saulge, et Dollé de Luzy sont assassinés. Quelques jours après
le bombardement de Nevers par l'aviation alliée (16-07) et avant leur départ
définitif (6-09), les allemands font sauter le viaduc de chemin de fer (3-09).
Arrive la Libération ! A l'administration
de Vichy se substitue celle du Gouvernement provisoire. Le nouveau préfet de la
Nièvre sera M Jacquin, les maires de Nevers issus de la résistance seront : Léon
Sainson, puis Marcel Barbot, puis Marius Durbet. Le procès de la Spac aura lieu
le 26 02 45 (témoignages de Marlin et de Bourdillon) : Fourcade et Dumontel
seront condamnés à mort.
Epilogue
Charles
Bourdillon est nommé, le 16 septembre 1946, Vice Président de la Commission
Administrative de l'Hôpital. Il occupera ce poste pendant 14 ans. René Marlin,
Directeur de l'Hôpital de 1939 à 1964 devient l'un de ses meilleurs amis.
Ses confrères qui lui font confiance le
portent le moment venu à la Présidence pour la Nièvre du Conseil de l'Ordre des
Médecins, et du Syndicat des Médecins.
Charles sera le premier président du MRP
pour la Nièvre. Jusqu'à sa mort, en 1963, il militera pour la liberté dans le
cadre des valeurs de la démocratie chrétienne.

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Charles Bourdillon et sa femme Marie Prévost
Sa femme et ses enfants
Charles s'est mariée avec
Marie
Prévost. Elle était infirmière à la Salpêtrière
Ils
auront trois enfants :
Jacques, polytechnicien, reçu dans la même promotion que Francis de la branche
cadette ; Madeleine, médecin neuro-psychiatre et Monique qui a fait l'école
supérieure des arts décoratifs.
Jacques
aura quatre enfants : Christophe (1950),
moniteur de ski ; Dominique (1951), ingénieur ; François (1953), médecin et
auteur du site internet de la famille et Sophie (1961), infirmière.
Le Praz de Saint Bon en Tarentaise, village où Charles Bourdillon aimait passé
ses vacances

Charles Bourdillon au sommet de la croix de Verdon
(tarentaise) avec sa soeur Hélène

De gauche à droite
Marie et Charles Bourdillon (Gros-maman et Gros papa),
Léonie Borde (mère de Charles) et Gabrielle Borde derrière (tante Boubou) , Germaine, Juliette et Gabrielle Bourdillon (les
3 soeurs filles de Jules Bourdillon), Jules Borde (tonton Sonson) avec le chapeau (frère de
Léonie)
Les enfants ; Jacques, Madeleine (debout) et Monique
bébé) / Jean Bourdillon (avec la pipe), ? (sur la chaise longue)


Photo de famille devant la Maison blanche
Maison Blanche / Les Fresnes
Juliette ) / André / Charles / Gabrielle (Bébelle / Léonie Borde / Germaine /
Edouard / Marie (Gros Maman) / Félia Borde
Jean /Jacqueline / Yvonne (Tyvonne) / Hélène (Talène) / Madeleine (Ninou)
/
Enfants : Philippine et Rémi Borde



Le chalet des Murgers au Praz de Saint Bon construit
par Charles Bourdillon en 1935
photo de droite prise dans les années 40
Charles décède le 2 janvier 1963 à Nevers




Semaine religieuse du diocèse de Nevers 12 janvier 1963
- Hommage au Docteur Bourdillon
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Ce texte est extrait d’une communication
de Jacques Bourdillon, fils aînée de Charles, à la société nivernaise
des lettres, sciences et arts (an 2 000).